« Vous nous présentez un « budget de combat » ! »
Vous annoncez un niveau de contrainte jamais atteint ! Malgré tout, vous affirmez nous présenter un budget de combat, « de défense du pouvoir d’achat », offrant un « haut niveau de service », « orienté vers la transition » et « visant l’achèvement de grands projets ».
Que retenir de ce long plaidoyer pro domo ?
D’abord, il me faut vous remercier, puisque vous indiquez tenir compte de mes remarques sur la nécessité de contextualiser votre budget ! Vous voyez bien que l’opposition vous est utile. C’est une position tout à fait positive de votre part et je vous en remercie.
Ceci étant dit, je vais donner quelques pistes de lecture aux Thorigniens pour comprendre votre budget primitif.
Vous abusez d’un langage guerrier sans doute très à la mode en ce moment. Je reconnais bien là vos idoles. Mais je trouve ce discours anxiogène et objectivement faux !
Au mieux, il s’agit d’un combat contre vous-même et contre vos erreurs de début de mandat que vous tentez de faire oublier. Dans votre combat pour le pouvoir d’achat des habitants, par exemple, vous vous félicitez de l’absence d’augmentation du taux communal de la taxe foncière. Vous avez raison, l’augmentation de ce taux va à l’encontre du pouvoir d’achat des contribuables qui s’acquittent de cette taxe. Cela a été votre premier geste d’élus, geste inutile, à contre-temps et de panique.
Qui s’étonnera qu’un an avant les élections, vous n’augmentiez pas les impôts locaux !? Vous vous moquez de nous.
Il aussi nécessaire de dire que la note de présentation du BP n’a pas vocation à dresser le bilan du mandat ! Elle doit indiquer les orientations politiques de l’exercice budgétaire de l’année en cours. Or, vous nous proposez un bilan de mandat tout en couleur (ici tout rose !) et en contradiction avec le langage anxiogène qui dessine le contexte dans lequel vous cherchez à inscrire le budget !
Que retenir concrètement de votre budget primitif ?
Vous avez donné les chiffres. Je ne vais pas les reprendre un par un.
Le budget présenté est de 13 000 000 d’euros en fonctionnement. 66% des recettes de fonctionnement reposent sur les impôts locaux (8 800 000 euros dont 8 100 000 de contributions directes) auxquels s’ajoutent les dotations (2 500 000 euros). La dotation forfaitaire est cette année encore stable, un peu moins de 1 300 000 euros. Elle l’est depuis 2020. Impôts locaux et dotations stables, où voyez-vous l’incertitude ?
Les dépenses de fonctionnement inscrites au BP augmentent par rapport au CFU (ancien Compte Adminitratif) mais elles diminuent par rapport au BP 2024. Là encore, je l’ai dit et l’ai écrit à de nombreuses reprises : vous avez surestimé les dépenses de fonctionnement à chaque budget primitif et vous sous-estimez les recettes. Ce n’est jamais une bonne chose pour le débat démocratique, puisqu’il y a au final de tels écarts entre le BP et le CFU que le flou l’emporte sur ce que vous annoncez vouloir faire et sur ce qui est réellement fait dans l’année.
Si on entre un peu plus dans le détail, là encore aucune vraie surprise ! La part des dépenses de personnels est de 65% (8 350 000 euros pour 200 postes occupés) et les charges à caractère général à 28 %. Rien de neuf !
L’investissement 2025 est de 15 000 000 d’euros, ce qui s’explique par les « restes à réaliser » : 5 000 000 d’euros auxquels s’ajoutent les résultats de clôture (1 100 000 euros).
Je ne reviens pas sur les « reste à réaliser », dont j’ai beaucoup parlé. Chaque année, je le fais. Chaque année, je le redis : au-delà de l’écart entre le prévisionnel et le réel, derrière ces chiffres, ce sont des équipements non finalisés, donc des services non rendus ou rendus en mode dégradés. Cela relativise le « haut niveau de service » que vous vantez. Prenez l’exemple du gymnase dont les usagers attendent toujours la fin de la rénovation !
Les recettes d’investissement inscrites, ce sont essentiellement des recettes d’équipement (6 700 000 euros) et un emprunt prévisionnel de 6 000 000 euros auquel s’ajoute un virement de la section de fonctionnement de 1 000 000 euros !
Les dépenses d’équipement sont donc la clé de compréhension de votre mandat
Je voudrais rappeler que la remise à niveau des équipements fait partie des obligations des gestionnaires d’équipements publics. Ce n’est pas une ambition politique. C’est une obligation ! Bien entendu, je comprends que vous vous êtes attaqués au sous-équipement chronique des mandats précédents. C’est très bien ! Je comprends que vous ambitionnez aussi des réalisations visibles, pour les électeurs, en fin de mandat. C’est bien !
Pour l’expliquer, vous nous parlez de l’effet « naturel » du calendrier municipal. Selon vous, les projets prévus au début et à mi-mandat se concrétisent « naturellement » en fin de mandat. Bref, vous nous indiquez que le calendrier électoral guide votre action ! Là aussi, il est difficile de vous en vouloir. Mais cela n’a rien de naturel. C’est un choix de votre équipe et cela peut être à l’origine de sérieux problèmes. Je m’en explique rapidement !
Comme vous le savez, les Grecs anciens distinguaient trois temps (ou trois calendriers).
Le temps Chronos, d’abord, est le fil continu de secondes, de minutes et d’heures. C’est le temps séquentiel, le temps chronologique, qui se divise en passé, présent et futur. C’est celui qui vous tient, qui est confiné dans les bornes du mandat, et rythme votre action.
Le temps Kairos, c’est le moment opportun où quelque chose de spécial se produit. Ce temps-là ne se mesure pas en unités et sa valeur reste incalculable. Il renvoie à l’opportunité, à ces moments qu’on saisit ou ne saisit pas. On peut penser à la recherche de subventions et aux réponses opportunistes aux appels à projets. Vous l’avez fait.
Le temps Aiôn est celui des cycles de la nature, de l’histoire, voire du cosmos ! Il est tout aussi difficile à calculer, Aiôn mesure le temps long des cycles de renouvellement, tels que celui des saisons ou de l’histoire humaine. Ce temps permet une vision à (très) long terme de la durée des choses et des actions à entreprendre.
Ces deux derniers temps sont importants et ce sont peut-être eux qui intéressent le plus les habitants de Thorigny : le temps des opportunités, qu’on saisit ou pas, et celui des cycles longs, pour notre génération et celle de nos enfants : le temps des transitions climatiques, énergétiques, etc… Or votre bilan est très fragile sur ces deux points et notamment sur le dernier.
Pour être plus pragmatique encore et conclure
La dette en capital au 31 décembre 2024 est de près de 8 000 000 € (7 909 212.82 €) ; ce qui est important et ce montant sera encore plus important en 2029. Or peu a été fait, au cours du mandat, pour accompagner les grandes transitions en cours. On ne peut pas dire que la dette serve à préparer demain et c’est problématique pour la commune.
Enfin, ce « discours de combat » ne dit rien ou peu sur les politiques menées. La plupart des secteurs d’action communale sont à peine évoqués : la petite enfance (alors que les communes sont depuis le 1er janvier 2025 autorités organisatrices du Service Public de la Petite Enfance), la solidarité, l’action sociale, le logement etc.
Pour tout cela : la précipitation de fin de mandat, le peu de réflexion au-delà du temps du mandat et le flou sur les orientations actuelles des politiques locales, je vais voter contre le budget primitif 2025.