Mon Job ? Rendre service ! #2

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L’été dernier, nous avions rappelé des moments oubliés de l’histoire de la commune. Cette année, nous souhaitons dessiner quelques figures d’agents publics locaux. Cette nouvelle mini-série estivale doit beaucoup aux échanges que nous avons avec les agents communaux. Les employés de mairie font rarement parler d’eux. La motivation de service public est souvent la plus forte, mais ils ne sont pas épargnés par la souffrance au travail.

Les raisons en sont multiples : les réorganisations menées au pas de charge, le surmenage, les conflits avec la hiérarchie ou entre collègues, les restrictions budgétaires, l’insuffisance des effectifs et la montée des exigences des administrés. Bref, les agents des communes ont besoin que le travail accompli soit reconnu, par leur encadrement, par les élus et par le public. En aidant à mieux les connaître, on espère y contribuer. Cette fois encore, on a fait appel à la « plume » imaginative et libre (très libre !) de Fabrice Hamelin.    

PORTRAIT # 2

Nina n’est pas avare en sourires. Sa “boss” le lui a bien expliqué : les activités d’accueil sont devenues essentielles à la « qualité » du service public. Pour les usagers, elle est de fait le premier contact qu’ils ont avec l’administration communale ! Depuis quelques semaines maintenant, Nina est agent d’accueil au  guichet unique.

Elle bénéficie d’un parcours emploi compétence (PEC). C’est le nouveau nom des contrats aidés ! Sur le papier, ses missions sont simples. Elle accueille, renseigne et oriente, du mieux qu’elle peut, vers les services compétents. Elle n’était pas plus volontaire que cela. Elle se sait timide et puis l’organisation administrative lui parait un peu compliquée ici. Il n’est pas toujours facile de savoir qui fait quoi. Mais, il n’y a pas vraiment eu de plaintes des usagers. Elle doit donc s’en sortir avec les honneurs !

De toute façon, elle est là pour un an, au plus. Elle n’est pas certaine d’avoir envie de rester d’ailleurs. Ce n’est pas tant que le guichet unique lui pose souci. C’est un outil qui s’est largement généralisé. Aujourd’hui, quelle commune n’a pas son guichet unique ? Le top, lui a dit sa boss, c’est le guichet unique numérique. Les gens n’ont plus vraiment besoin de se déplacer : ça s’appelle le “Portail famille” !

Non, ce qui l’interroge, c’est plutôt le lieu où le guichet est installé. Elle est assise dans le hall du centre culturel, dans un coin qui lui donne vue sur la rue, la maison des associations en face et, à l’intérieur, la bibliothèque municipale ! Cela lui a semblé bizarre au début. C’est aussi un peu ouvert à tous les vents. Des fois, elle se fait peur toute seule. S’il y a un usager qui fait un malaise, qui tombe là, devant elle, elle fait quoi ? Et puis, il y a parfois des questions de confidentialité. C’est plus particulièrement là que ses sourires sont encourageants ! 

Ce centre culturel devenu centre administratif, c’est un peu “incongru” comme dirait son petit frère, qui aime bien répéter les mots qu’il vient d’apprendre.  “Une place de village où tout le monde peut se retrouver”, “Un vrai lieu de vie” ! Ça la franchement fait rire quand elle a lu ça sur le site de la mairie. Ils sont quand même forts à la com !  Le plus rigolo, c’est quand le guichet s’installe dans la roulotte, au forum des associations ou lors du village estival. Là, c’est chaud ! 

Des collègues lui ont dit qu’au départ, le hall avait été choisi pour préparer la fusion entre le guichet municipal et le guichet de La Poste. Pendant un moment, il était question que l’agence de La Poste ferme. Avant que les habitants ne se mobilisent, l’équipe municipale semblait d’ailleurs avoir bien envie de créer un bureau postal communal avec du personnel municipal et (surtout) un financement conventionné avec La Poste ! Cela aurait été trop bizarre de l’installer dans le bâtiment de la mairie… 

La localisation du guichet n’a pas été sans conséquence. Cela a été la première étape du jeu de chaises musicales dans lequel les services sont engagés depuis la mi-mandat. Dernier en date, le CCAS vient de s’installer de l’autre côté de la rue. Des services ont été relocalisés à proximité immédiate du centre culturel (l’état civil, le service scolaire, …). Certains ont vu leurs locaux reconfigurés, comme la bibliothèque. D’autres encore sont éloignés du centre ville : le local de la police municipal, le service jeunesse… Va savoir pourquoi ? La mairie a même repris le presbytère !

Ça râle chez les chefs de service et cela pèse sur le moral des agents. Personne n’a pu lui expliquer ces déménagements… Et, comme il faut que ça ait l’air cohérent et pensé dans l’intérêt des habitants, avant les élections, c’est tendu… ! Sa “boss” dirait : “Ma petite Nina, le moral est dans les chaussettes” ! C’est le seum, quoi !  Il parait que le médecin du travail ne vient plus. Les mauvaises langues disent que certains trouvaient qu’il accordait trop d’arrêts maladie !  

Un de ses collègues lui a expliqué qu’il faut être vigilant, parce que  le guichet unique peut aussi éloigner la population des agents communaux. Les seuls auxquels elle a encore facilement et naturellement accès, ce sont ceux qui sont présents dans les  rues : les agents techniques, en charge de la voirie, des espaces verts ou des animations. Les usagers sont désormais un peu maintenu à distance. Ils le sont d’ailleurs aussi du bâtiment de la mairie dont on ne sait plus trop bien à quoi il sert et dans lequel on ne se rend plus comme avant ! Elle en est un bon exemple. Ce n’est pas elle qui va aller assister au conseil municipal… Et, elle ne compte pas non plus se marier ! Enfin pas tout de suite…

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